le 9é de l'occupation à la libération
Le 9e de l’Occupation à la Libération
Par Alexandre Bande
Le 14 juin 1940, après quelques semaines d’affrontements venus mettre un terme à la « drôle de guerre », Paris, occupée par les troupes allemandes, devient le siège des autorités allemandes et de ce fait, l’un des théâtres majeurs d’actes de la Résistance dans un contexte de difficultés de ravitaillement et de contraintes liées aux réquisitions et aux interdictions. De surcroît, la population juive est particulièrement touchée par les mesures antisémites imposées par les autorités allemandes et le gouvernement de Vichy ainsi que par les rafles promulguées dès mai 1941.
Les habitants du 9 e face aux conséquences de la défaite et de l’occupation (1940 – 1941)
Les effets immédiats de l’occupation
En se déclarant « ville ouverte », Paris se rend à l’ennemi sans combat en juin 1940, ce qui explique que la ville ne subit pas de destructions. Le Haut-commandement allemand pour la France (MBF) installe ses services à l’hôtel Majestic, le gouverneur militaire de Paris à l’hôtel de Crillon, le siège de la Gestapo avenue Foch tandis que l’hôpital Lariboisière devient l’hôpital allemand.
Siège de la Kommandantur place de l’Opéra © Musée de la Résistance en ligne
Dans cette géographie du « Paris allemand », le 9e arrondissement n’est pas central mais il est tout de même concerné puisque la Kommandantur s’installe tout près, à l’angle de la rue du 4 septembre et de l’avenue de l’Opéra (puis en 1943, la Milice viendra occuper le siège du Parti Communiste, carrefour de Châteaudun). Paris vit désormais à l’heure allemande. Ce nouveau visage de la capitale va devenir le quotidien des Parisiens pendant toute la durée de l'Occupation.
La ville est peuplée de soldats qui vivent dans des casernes, chez l’habitant, dans des appartements réquisitionnés ou spoliés, ils ont logiquement des loisirs comme la fréquentation de cabarets en particulier à Pigalle mais aussi de maisons closes, dont le 9e arrondissement semble bien doté. On y découvre l’une d’elles rue Rochechouart, une autre rue Saint-Lazare, mais également d’autres, rue de Montyon, rue de la Grange Batelière et celle de la rue Saint-Georges : Chez Marguerite. Cet ancien atelier de fabrication d’instruments de musique, ouvert en 1846 par le belge Adolphe Sax (inventeur du saxophone), est devenu, dans les années 1930, un dancing et un bordel, considéré comme la plus grande maison close de France, occupant trois étages d’environ 420 m2. Lorsqu’ils prennent possession de Paris le 14 juin 1940, les Allemands s’empressent de réquisitionner Chez Marguerite pour le divertissement de leurs officiers, dont Goering[1].
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Fresque du 50 rue Saint-Georges (Chez Marguerite), enlèvement d’une Sabine © Michel Coquereau
L’arrondissement est touché par la guerre, et dès avant l’entrée des troupes allemandes ont lieu les premiers départs, si certains rentrent chez eux après l’exode, bon nombre d’habitants du 9e choisissent de ne pas regagner la capitale. Ceux qui sont restés, comme la majorité des autres Parisiens, manquent de tout.
Les premières cartes de rationnement apparaissent dès le 23 septembre 1940. C’est le règne du système D. Le marché noir se développe, accentuant encore les inégalités sociales. Les automobiles étant réservées à l’administration allemande, les Parisiens se déplacent dans des autobus à gaz, en métro ou encore à vélo. Les semelles de bois ou de liège remplacent le cuir. Tout est soumis au rationnement, le tabac, la laine…
Arrêté de la Préfecture de police sur les files d’attente et cartes de priorité
Les Juifs du 9 e à l’épreuve des premières mesures discriminatoires
Si le quotidien est difficile, il l’est davantage encore pour la population juive rapidement soumise à la politique antisémite menée conjointement par les forces allemandes et les autorités de Vichy. 200 000 Juifs résident dans la capitale et sa proche périphérie. 7 à 8 % du total habitent le 9e, cela correspond toutefois à plusieurs milliers de personnes, des centaines de familles, qui peuvent être particulièrement nombreuses dans certains immeubles. A peine installées à Paris, les autorités d’occupation sont obsédées par « l’ennemi juif », et à partir d’août 1940, l’administration militaire allemande met en place des mesures destinées à marginaliser les Juifs parisiens. En quelques semaines sont imposés recensement général et l’apposition d’une affiche jaune, « ENTREPRISE JUIVE », sur chaque magasin appartenant ou géré par un Juif.
Ceux-ci sont exclus de la police, de l’enseignement (où quelques dérogations sont prévues en faveur des anciens combattants), de la presse, du cinéma, du théâtre et de la radio. Est considéré comme Juif celui qui a trois grands-parents juifs, ou deux, si son conjoint est juif. A partir de juin 1941, deux grands-parents juifs suffisent. Les autorités allemandes ordonnent l’apposition de la mention « JUIF » sur les pièces d’identité des adultes de « race juive » et une formidable propagande inspirée par les services allemands est diffusée partout. Les populations juives du 9e, au même titre que celles du reste de Paris, doivent affronter ces mesures destinées à les marginaliser, certaines familles décident de passer en zone non occupée, d’autres tentent de quitter la France.
Parmi les nombreuses conséquences, l’une des plus visibles touche les établissements scolaires dont les professeurs juifs sont victimes. Pourtant, cette présence était fort modeste : les juifs représentaient 0,8 % de l’ensemble des professeurs du secondaire et 2,4 % des enseignants du supérieur. Au lycée Condorcet[2] par exemple, dès les derniers mois de 1940, se décide et s’exécute l’exclusion des enseignants juifs. Dans le même temps, on constate d’importants départs parmi les élèves juifs.
Les premiers actes de Résistance
À Paris, dès les débuts de l’Occupation, différentes formes de résistance apparaissent. Elles sont le fait d’initiatives personnelles ou de petits groupes qui vont s’organiser. La Résistance prend le plus souvent une forme clandestine mais elle s’exprime parfois courageusement dans des regroupements publics, telle la manifestation des lycéens et étudiants du 11 novembre 1940, place de l’Étoile, ou s’affichent par des inscriptions sur les murs, des papillons...
Parmi les nombreuses trajectoires qui retiennent l’attention, celle de Jacques Decour, Daniel Decourdemanche de son vrai nom, doit être évoquée.
Nommé au lycée Rollin, avenue Trudaine, à la rentrée d'octobre 1937, il est alors l'un des plus jeunes professeurs agrégés des lycées de la capitale. Appelé sous les drapeaux lors de la déclaration de guerre du mois de septembre 1939, Decour devient le chauffeur de De Lattre de Tassigny. Une fois l’armistice signé, il rentre à Paris et prend contact avec ses camarades communistes, Georges Politzer et Jacques Solomon, dont il avait fait la connaissance, avant-guerre, notamment au sein de l'Université Ouvrière où tous trois donnaient des cours. Au mois de novembre 1940 il est l’un des instigateurs avec Politzer et Solomon de la parution du premier numéro de L'Université Libre, tiré à 1 000 exemplaires, puis prenant la tête du Comité National des Ecrivains, il s'attelle à l'élaboration du premier numéro des Lettres Françaises.
Illustration : Daniel Decourdemanche dit Jacques Decour © Wikimedia
Moins célèbre mais révélateur de la précocité de certains engagements[3], on peut noter, au 10, rue du Faubourg-Montmartre l’endroit où fut tiré en secret Libération Nord, journal fondé dans la clandestinité en 1941 par Christian Pineau.
Les temps difficiles (1942- 1944)
L’essor des activités de résistance
Le conflit s’installe dans la durée, ses effets sur les populations civiles sont de plus en plus sensibles, la Résistance s’organise et la répression devient plus dure.
Si l’on se penche sur le 9e, on perçoit une activité dont les formes sont multiples malgré les risques que font peser les autorités allemandes et françaises sur ceux qui osent défier l’ordre établi.
En juin 1942, au carrefour La Fayette, au niveau des 26-28, rue de la Chaussée d’Antin a lieu une manifestation organisée par les militantes des comités de femmes du PCF de Paris. Cette manifestation s’inscrit dans un mouvement de contestation organisé par le PCF à partir du printemps dans le but « d'organiser des manifestations contre le rationnement, d'envahir en masse les restaurants et épiceries de luxe et de partager les vivres ».
L’histoire de l’arrondissement est liée au nom d’un autre héros de la résistance, Honoré d’Estienne d’Orves (la place de la Trinité porte son nom depuis le 22 octobre 1944). C’est sur cette place et dans l’église qu’il fixait ses rendez-vous clandestins à ses compagnons de lutte.
En effet, capitaine de corvette au moment où la guerre commence et entré très tôt en résistance après la capitulation française, il se rallie aux anglais en septembre 1940 et se présente à De Gaulle et à l’amiral Muselier, puis il s’engage à récupérer des informations et des recrues venant de la France occupée et à y envoyer des agents. Le 25 décembre, la première liaison radio entre la France occupée et Londres est établie. Dès le 27 décembre il est à Paris où il rencontre des pionniers de la Résistance. Mais peu de temps après, dénoncé, il est arrêté près de Nantes dans la nuit du 21 au 22 janvier avec tout son réseau. Emprisonné au Cherche-Midi, puis à Fresnes, Honoré d’Estienne d’Orves est fusillé en août 1941 au Mont Valérien[4].
Autre sort dramatique : celui de Daniel Decourdemanche qui est arrêté par les brigades spéciales de la Préfecture de police de Paris, le 17 février 1942 alors qu'il se rend chez Georges et Maï Politzer pour les avertir qu'ils sont recherchés. Ces arrestations ne sont pas isolées. Entre la mi-février et le début du mois de mars 1942, près d'une vingtaine de responsables et militants communistes tombent dans les filets de la police. Le 20 mars, Decour est transféré à la prison de la Santé et sera fusillé le 30 mai 1942 au Mont-Valérien, en représailles des attentats perpétrés au cours des semaines précédentes.
Dans le même temps, l’arrondissement est le théâtre de plusieurs événements révélateurs de l’essor des activités de résistance. Le 28 janvier 1942, organisé par les Bataillons de la Jeunesse emmené par Jean Quarré, au 58-60, rue du Faubourg Montmartre[5], à La Chope Montmartre (angle de la rue de Châteaudun), est perpétué un attentat contre une cantine de la Wehrmacht. Les responsables de l’opération sont des membres des Bataillons de la Jeunesse (PCF) emmené par Jean Quarré. Dans ce restaurant réquisitionné se trouvaient alors dix soldats nazis : plusieurs sont tués, d’autres blessés. Jean Quarré est arrêté peu après par la police française et fait partie des vingt-sept résistants communistes qui sont jugés ensemble du 4 au 14 avril 1942 par une cour martiale allemande au procès de la Maison de la Chimie. À l’issue d’une parodie de procès où ils sont défendus par des avocats commis d’office, les juges militaires allemands condamnent à mort vingt-cinq des accusés. Une femme du groupe, Simone Schloss, est exécutée en Allemagne au mois de juillet, une autre graciée. Mais leurs vingt-trois camarades masculins sont fusillés au Mont-Valérien le 17 avril. Jean Quarré était du nombre. Il a laissé une lettre très émouvante à sa mère et à son jeune frère.
Tombe Jean Quarré au cimetière d’Ivry © Wikimedia
Peu après, au 24, rue de Clichy, Roland Fargeon établit la centrale de l’OCM (Organisation Civile et Militaire) Région Nord. Il est arrêté en 1943 et de nombreux renseignements sont découverts par les Allemands.
Au 5, rue du Faubourg Montmartre, le Café de l’Electricité tenu par Margot Khill, est une « boîte aux lettres » de ce réseau ; cette même adresse aurait également été le lieu de rencontre de certains membres du réseau Eleuthère, un réseau fondé en mai 1943 par Hubert de Lagarde et André Brouillard (Pierre Nord). Le 26 octobre 1943, le groupe FTP MOI, Leo Kneler/Celestino Alfonso Matos/Marcel Rajman, attaque à la grenade, un hôtel situé au 15, rue de Montyon, hôtel réservé aux permissionnaires allemands de la Wehrmacht. Quelques jours plus tard, le 30 octobre, au 75, rue de Caumartin, un restaurant fréquenté par des officiers allemands est également visé de la même façon. Le rôle de la Résistance étrangère et souvent juive mérite d’être ici souligné, elle s’incarne également, à l’échelle de l’arrondissement, en la personne de Salomon Schapiro qui résidait au 31, rue Bergère. Né en Pologne, cet ouvrier fourreur, juif, communiste et membre des FTP MOI, s’était installé à Paris en 1938. Il a joué un rôle important dans plusieurs actions de sabotage des machines dans des petits ateliers artisanaux de la fourrure. Puis à partir de 1943 il participe à de nombreuses actions plus violentes. De retour d’une opération qui a lieu dans la nuit du 25 au 26 octobre 1943, il est arrêté par la police française. Livré aux Allemands, incarcéré à Fresnes, Salomon Schapira compte parmi les vingt-quatre accusés de « l’Affiche rouge » qui comparaissent du 15 au 18 février 1944 devant le tribunal du Grand Paris qui siégeait rue Boissy-d’Anglas. Comme Manouchian et les autres accusés, Schapira est fusillé au Mont-Valérien le 21 février.
Le temps des rafles et de la déportation des Juifs du 9 e arrondissement
Période terrible que celle des années 1942-1943 pour les Juifs du 9e (comme pour leurs coreligionnaires de la capitale et de tout le pays). Dès janvier 1941, le représentant d’Adolf Eichmann en France, le lieutenant SS Dannecker exige la création d’un Office central juif. L’aryanisation économique devient officiellement une politique de spoliation prise en charge dans tout le pays au nom d’un projet antisémite. A partir du printemps 1941, les nouvelles dispositions contre les Juifs imposent le blocage des comptes commerciaux et privés. À Paris, en liaison étroite avec l’administration française, les autorités allemandes procèdent aux premières arrestations. Le 14 mai 1941, 6 494 Juifs apatrides sont convoqués par la Préfecture de police ; 3 747 (soit 58 %) se rendent à l’examen de situation dans des commissariats où ils sont arrêtés pour être transférés dans les camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande (Loiret). C’est la rafle dite du « billet vert » à cause de la couleur du document envoyé par les autorités aux personnes visées par les arrestations. Un élève du lycée Condorcet est de ceux-là, il se nomme Roger Perelman et s’est rendu au commissariat de l’Opéra (première arrestation)[6].
Le 12 décembre 1941, des Feldgendarmes, assistés de policiers parisiens, arrêtent près de 750 Juifs français, des notables, des anciens combattants, résidant dans les beaux quartiers de la capitale[7]. Cette rafle dite « des notables », touche un élève du Lycée Condorcet, Vidal Chapira et son père. Malgré les démarches du proviseur[8], Vidal décède de tuberculose peut après sa sortie de l’hôpital Broussais. Les violences antisémites dont sont responsables certains Français rejaillissent sur l’arrondissement. Ainsi, dans la nuit du 2 au 3 octobre 1941 une bombe explose dans la grande synagogue 44, rue de la Victoire, lors d'une nuit d'attentats touchant au total six synagogues parisiennes, organisée par le Mouvement social révolutionnaire, parti fondé par l’ancien « cagoulard », Eugène Deloncle.
A partir du début de l’année 1942, la pression nazie se fait plus forte sur les Juifs de France et plus particulièrement sur ceux de Paris. Ainsi Harry Baur, célèbre comédien résidant rue du Helder, est arrêté par la Gestapo en mai et décédera en 1943 des suites de la torture subie
Harry Baur © Wikimedia
Alors que la « Solution Finale » a été actée à Wannsee le 20 janvier et que les mesures discriminatoires s’accentuent (port de l’étoile jaune), le sort des Juifs du département de la Seine est précaire. À l’évidence, c’est dans la capitale qu’un maximum de victimes peuvent être trouvées. En vue de la grande rafle, les « fichiers juifs » parisiens sont mobilisés[9].
Au sein de la Préfecture de police, il y a cependant un certain nombre de fuites. Certains, prévenus de l’imminence de la rafle se sont cachés (en particulier les hommes car nul ne peut alors imaginer que les femmes et les enfants sont en danger), d’autres sont parvenus à s’enfuir.
Premier constat frappant : plus on se rapproche du centre de Paris, plus le taux d’arrestations est faible. Assurément, là où les Juifs sont les plus concentrés, dans les mêmes rues, des immeubles ou appartements voisins, ils peuvent davantage échanger des informations, être alertés et s’entraider. Le rôle des commissaires de police sera également loin d’être négligeable. Dans le 20e, Florentin Brune va jusqu’à faire distribuer des outils pour forcer ou casser les portes ! D’autres commissaires, à l’inverse, font comprendre à leurs équipes qu’elles ont une mission pénible à accomplir, qu’elles doivent obéir mais se montrer humaines. Ainsi parlent Georges Ballyot dans le 8e arrondissement ou Edmond Sabaut dans le 10e (où seulement 25 % des Juifs visés sont arrêtés).
Plongés au cœur de ces terribles événements, les Juifs du 9e sont évidemment touchés également.
Ainsi 28 élèves du lycée Rollin (Jacques Decour), plusieurs de ceux de nombreuses écoles primaires de l’arrondissement, des élèves du lycée Condorcet sont arrêtés et déportés. Le rythme des arrestations ne ralentit pas en 1944.
La carte des enfants juifs déportés à Paris permet de signaler les tristes trajectoires des sœurs Lederfarb.
Alice Lederfarb, née le 23 septembre 1931 à Paris, vivait au 22, rue de la Tour d'Auvergne avec ses parents, Symcha et Frymeta, originaires de Lublin (Pologne), et sa sœur Pauline. Le père est raflé le 14 mai 1941 puis déporté par le convoi n°5, la mère par le convoi n°16 et les deux fillettes le 21 août 1942 par le convoi n°22. À l’arrivée à Auschwitz-Birkenau le 23 août, 90 hommes et 18 femmes sont sélectionnés pour des travaux forcés. Les autres déportés, pour la plupart des enfants, sont gazés dès leur arrivée au camp. Selon l’historien Serge Klarsfeld, on dénombrait sept rescapés de ce convoi en 1945.
Enfin, comme tous les arrondissements parisiens où les Juifs étaient nombreux avant la guerre, les spoliations d’appartements ou commerce ont été particulièrement nombreuses[10].
Le 9 e dans les combats de la Libération
Difficile de reprendre ici dans le détail le processus de la libération de Paris.
Charles Tillon, après le débarquement des alliés le 6 juin, défend en tant que chef des FTP deux idées forces : intensifier les actions et accélérer la levée en masse, tout en observant les règles de la guérilla et en évitant tout combat frontal avec l'ennemi. Le 8 août, il place les FTP d'Ile-de-France, dirigés par Albert Ouzoulias, sous le commandement de Rol-Tanguy. Deux jours plus tard, il appelle les Parisiens à l'insurrection. Le 9e arrondissement est concerné, au même titre que les autres arrondissements parisiens ; dès le 19 août, des affiches et des appels au soulèvement sont collés dans les rues.
Avis à la population du 9e © musée de la Resistance en ligne
Un document imprimé peu avant dans une imprimerie clandestine rue Pigalle informe les habitants de l'arrondissement de la naissance d’un comité de libération du 9e arrondissement qui constitue la nouvelle municipalité et dont le siège se trouve au 6, rue Drouot. Maurice Fontaine du Front National (d’obédience communiste) en est le nouveau maire, ses adjoints sont Lucienne Didner, représentante de la résistance, Aimé Texier, représentant de Libération, Jules Vaugon, représentant de l’union des syndicats et Roger Bordet, représentant du Parti communiste. Le temps est venu de la réorganisation politique mais également celui des combats et des barricades. Le 22 août, Rol-Tanguy fait afficher un ordre pour la défense de la population parisienne, accompagné d’un appel : Tous aux barricades ! Le même jour, la presse, enfin libre de paraître, diffuse des instructions pour les construire.
Celle de la place de Châteaudun devant l’ancien siège de la Milice alors occupé par le PCF reste dans la mémoire des habitants du 9e.
Barricade carrefour de Châteaudun © Paris Musées collection
Si les combats y sont moins denses que dans le centre ou le Sud de Paris, ou que dans le quartier des Batignolles, ils sont malgré tout meurtriers comme le démontre la plaque en l’honneur d’Adolphe Pétrement, tombé au 81, rue de Dunkerque (ancien combattant de 14-18, employé des Assurances sociales). Le 24 août, la 2e DB entre dans Paris et attaque dans deux directions, par la Rue de Rivoli vers l’hôtel Meurice et par l’avenue de l’Opéra. La capitulation de Von Choltiz intervient vers 14h30, quelques temps après, c’est au tour de la Kommandantur de capituler. L’Hôtel Scribe, place de l’Opéra, est transformé en centre de presse où sont installés les correspondants de presse alliés. Épargné par les derniers bombardements allemands du 26 août, le 9e arrondissement sort de la guerre avec de nombreuses séquelles. Le temps de la reconstruction, de l’épuration et du bilan est venu, celui de la mémoire viendra plus tard.
[1] Ironie de l'histoire, le Comité de Libération du 9e arrondissement s'y installe dès le 25 aout 1944
[2] https://ancienscondorcetparis.fr/2023/03/16/conference-de-pierre-albertini-14-03-2023/
[3] Sur ce point l’article de Françoise Robert : http://www.neufhistoire.fr/articles.php?lng=fr&pg=323&tconfig=0
[4] Un des contacts d’Honoré d’Estienne d’Orves est Max Heilbronn, gendre d’un des fondateurs des Galeries Lafayette, qui entre dans le réseau résistance Fer, (appelé NAP Noyautage des Administrations publiques) créé en septembre 1942 par René Hardy, il est arrêté à Lyon en juin 1943, il survit à la déportation et devient directeur des Galeries Lafayette en 1945.
[5] Le Maitron dit le 61
[6] https://www.lemonde.fr/shoah-les-derniers-temoins-racontent/article/2005/08/22/roger-perelman-une-enfance-francaise_681092_641295.html
[7] Quelques mois après le tournant de l’invasion de l’URSS, la « Shoah par balles » fait alors des centaines de milliers de victimes juives, Marie Moutier Bitan « Les champs de la Shoah », Passés Composés, 2020.
[8] Le proviseur a immédiatement signalé l’internement de Chapira à ses supérieurs hiérarchiques, sans résultats. Le 21 avril 1942, André Leroy écrit au recteur : « J’ai l’honneur de vous faire connaître que le jeune Chapira Vidal, élève de Première B, et dont je vous avais signalé l’internement comme israélite au camp de Compiègne, vient d’être libéré comme gravement atteint de tuberculose et qu’il se trouve mourant à l’hôpital Broussais ». https://ancienscondorcetparis.fr/2023/03/16/conference-de-pierre-albertini-14-03-2023/
[9] Voir les travaux de Laurent Joly, « La Rafle du Vel d’Hiv », Grasset, 2022.
[10] SPOLIATION ET VOISINAGE, Le logement à Paris, 1943-1944, Isabelle Backouche, Sarah Gensburger, Eric Le Bourhis Société française d'histoire urbaine | « Histoire urbaine » 2022/1 N° 62 | pages 79 à 102
Catégorie : - Histoire
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