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Les Lorettes

LES LORETTES

C’est le nom donné aux jeunes femmes qui au début du XIXe siècle cherchaient une vie meilleure dans le quartier St Georges, autour de l’église Notre-Dame-de-Lorette nouvellement construite (1836).

C’est Nestor Roqueplan qui les a ainsi baptisées et c’est  Constantin Guys mais surtout Gavarni[1] qui les ont “croquées”: « Gavarni est l’inventeur et le répondant de la Lorette. Il l’a trouvée, il l’a baptisée, il l’a parée à ravir. Il a lâché des esquisses sans nombre à travers la ville réjouie au feu de son esprit » (Jules Janin).

Dans le Littré on trouve une définition des Lorettes : nom qu’on donne à certaines femmes qui tiennent le milieu entre la grisette (jeune fille ayant un emploi -mercière, gantière, modiste- également à la recherche d’un protecteur) et la femme entretenue.

C’est dans le quartier St Georges, tout nouvellement loti, qu’on les trouve : les locations y sont à bas prix (il faut "essuyer les plâtres") ; ce sont souvent des filles de condition modeste, filles de concierges ou de marchands d’échoppes. Les Boulevards, les théâtres,  l’opéra Le Peletier, les restaurants sont pour elles un formidable terrain de chasse. « Hier aux Italiens, j’étais au balcon, sur sept femmes autour de moi il y avait six lorettes, les jupes bouffent jusqu’au rebord de la loge, leurs cheveux crêpelés, frisés, étagés attirent l’œil comme la laine d’un animal exotique. Les pendants d’oreille bruissent au-dessus des épaules trop blanches, elles se penchent exprès, elles veulent être folâtres ou majestueuses, elles font des mines, sourient à l’excès, telles que les voilà, avec leurs gants à sept francs, leur voiture neuve, leurs deux laquais, leur loge de cent francs, leur ton de garçon, elles se croient des dames. Et dans les moments de misanthropie, on se demande si elles n’ont pas raison » (H. Taine Notes sur Paris).

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Constantin Guys: Dans la rue

On voit au commentaire de Taine que leur éducation est sommaire et leur comportement empreint de vulgarité, mais si elles trouvent un riche protecteur elles peuvent se transformer et devenir des compagnes qu’on peut montrer dans les endroits à la mode (Tortoni, le Café Riche…) Emile de Girardin ne s’y trompait pas : « on soulignera, non sans le déplorer, qu’il devient difficile de distinguer une lorette d’une duchesse. Une même élégance les confond, l’une jouant aussi bien de l’éventail que l’autre, toutes ont l’aisance et le bon ton et minaudent en respirant les sels réanimateurs de Guerlain »

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Malgré tout leur devenir est sombre. A part quelques unes (La Païva, Marie Duplessis dite la Dame aux camélias, Emilienne d’Alençon) elles vieillissent dans l’anonymat et souvent la misère et ce phénomène social se poursuivra dans le quartier St Georges, dit Bréda, presque jusqu’à la fin du siècle.

Emile de la Bédollière fait ce triste constat : « sur 100 sujets, 17 sont morts de phtisie, de péritonite et autre affection chronique. On compte aussi 6 proxénètes, 8 dames de compagnie, 6 femmes de ménage, 3 épileuses, 2 loueuses de chaises, 9 revendeuses à la toilette, 4 émigrées pour l’Australie ou la Californie, 2 mariées avantageusement à des étrangers, 2 mariées en France, une extralucide donnant des consultations, 5 enfermées comme folles à la Salpêtrière, 5 suicidées par ennui ou par misère, 1 suicidée par amour etc.  . ».

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Constantin Guys: le bal Mabille


[1] Sulpice Chevallier (1804-1866), dit Gavarni, est l’artiste qui a illustré les Lorettes. Son buste orne la fontaine de la place St Georges.

Françoise ROBERT

© F. Robert 2009-2014 © 9ème Histoire 2014


Date de création : 16/06/2014 • 21:25
Catégorie : - Personnages
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