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Le Cénacle de la rue des Martyrs

LE CÉNACLE ARTISTIQUE DE LA RUE DES MARTYRS,
LE ROMANTISME À FLEUR DE PEAU

 


C’est devant une salle comble que Marie-Claude Chaudonneret a donné sa conférence lundi 9 mars dans la salle du Conseil de la mairie, à propos du cénacle artistique qu’avait créé Horace Vernet peu avant 1820, rue des Martyrs.
A cette époque, ce quartier encore champêtre, occupé par des jardins et des vergers, commençait en effet à attirer des artistes désirant fuir l’agitation parisienne.
Ce fut le cas d’Horace Vernet, jeune peintre déjà talentueux, récompensé à vingt-trois ans par une médaille d’or au Salon de 1812. Celui-ci, né juste avant la prise de la Bastille en 1789, avait grandi jusque là dans l’ombre de son père Carle, spécialiste des scènes de chasse et de bataille, qui tenait un atelier de peinture.
C’est d’ailleurs là qu’il rencontra encore adolescent, Théodore Géricault, dont il fit le portrait et qui partageait la même passion pour le cheval. Les deux jeunes artistes allaient ainsi souvent chevaucher ensemble.

Géricault avait commencé à travailler chez son père, non loin, dans la manufacture de tabac rattachée à l’Hôtel d’Augny, future mairie du 9e (cf. article de J.F.Belhoste dans le bulletin 2013 de 9ème Histoire et sur le site neufhistoire.fr), avant d’aller, en 1813, 23 rue des Martyrs créer son propre atelier où il réalisera en 1814 le fameux « Cuirassé blessé quittant le feu », avec ce regard tout empreint de désarroi.  


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       Cuirassier blessé quittant le feu - TH. Géricault 1814          Louise Vernet, enfant - Th. Géricault - (ca 1819) © RMN        

Horace Vernet installa  son atelier la même année à deux pas, dans un jardin, 11 rue des Martyrs.
Ils fréquentèrent aussi tous deux l’atelier de Guérin, qui hébergea  également Delacroix ou Ary SchefferC’est une véritable fraternité artistique qui s’établit en effet rue des Martyrs entre tous ces artistes et  leurs amis, comme le colonel Bro et Dedreux D’Arcy (lui-même passionné de cheval !). Dans cette sorte de phalanstère, Géricault réalise d’ailleurs les portraits de leurs enfants qui jouaient souvent ensemble…    
Les œuvres réalisées par Vernet et Géricault à ce moment là dénotent une volonté de créer une peinture d’histoire plus moderne, propre à la période romantique et sortant des canons classiques de l’époque précédente.

Lorsque Géricault meurt en 1824 à trente deux ans d’une chute de cheval, Horace Vernet avait déjà peint en 1821 son propre atelier où figurent beaucoup de ses amis et où trône encore un cheval (!), mais où est absent Géricault parti en Angleterre.

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Horace Vernet l'Atelier  du peintre (1821)

Ce tableau remarquable car plein de vie, montre un local de dimensions respectables,  dont on ignore cependant s’il se trouvait rue des Martyrs ou rue de la Tour des Dames où il avait ensuite emménagé.
C’est à cette époque que la nostalgie de la période napoléonienne  manifestée par Horace Vernet et qui n’a pas bien sûr la faveur des Bourbons de retour au pouvoir, l’empêche de figurer au Salon de 1822.

Il a alors l’idée de faire sa propre promotion en créant  le « Salon d’Horace Vernet » où il réunit quarante cinq de ses tableaux dont son « Atelier » et deux toiles refusées à ce même Salon.

Ces deux tableaux sont placés à l’entrée de l’exposition comme un défi à l’ordre régnant, car représentant « La Bataille de Jemmapes » (une des premières victoires des révolutionnaires) et « la Barrière de Clichy » (glorifiant la résistance des parisiens en 1814 face à l’envahisseur).

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                    La Bataille de Jemmapes - Horace Vernet                                                           La Barrière de Clichy  - Horace Vernet (1820) - © RMN

Il connait là un grand succès en tant que « peintre des émotions nationales ». Il est alors le représentant d’une grande liberté d’expression, l’ardent défenseur du politiquement non correct, pour parler moderne.

Sa belle carrière se poursuivra ensuite à l’Académie de France à Rome (la Villa Médicis) en 1829  où, défendant l’indépendance et la maturité de ses pensionnaires, il menacera de démissionner à deux reprises, toujours pour les mêmes raisons.

C’est cette réputation de frondeur (il y verra aussi d’ailleurs son intérêt financier !) qu’on retient encore aujourd’hui, malgré l’éreintement auquel se livra plus tard Baudelaire le traitant d’ « antithèse absolue de l’artiste » et de « militaire qui fait de la peinture » ! 

Marie-Claude Chaudonneret allait alors insister particulièrement sur la grande indépendance d’esprit d’Horace Vernet  à la fin de sa conférence, tenue justement deux mois après le terrible attentat contre la liberté d’expression commis à Paris,
l’histoire bégaie … 

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    Fragments de "La Barrière de Clichy" - Horace Vernet - 1820 -  © RMN

Emmanuel FOUQUET


Date de création : 11/03/2015 • 12:57
Catégorie : - Echos du Terrain
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